Il n'aurait pas fallu fermer les yeux : par-delà le sommeil, l'absence de mon habituel souffle vital fut réellement angoissant, et le traumatisme du néant ne se soignait plus aussi bien qu'auparavant.
Elle se pencha sur ma tombe, et déposa un bouquet de roses séchées sur la dalle tachée de mousse et de lichen.
Lorsque je me suis réveillé, elle était en train de me regarder avec bienveillance, remettant son chignon qui s'était déversé en un flot de cheveux cascadant sur son épaule. Elle reprit son foulard qui était tombé sur ma couverture, et le noua à son avant-bras, repartant en silence. La dernière vision que je vis d'elle fut cette pèlerine en fourrure, à l'odeur fauve qui m'avait si souvent entêté.
Je sortis de la chambre après avoir fait brûler du copal et de l'encens, et retourna auprès de la tombe, à l'extérieur.
Quel nom ridicule !
Quelle épitaphe... spéciale !
Je ne voulais certes pas mourir, non pas uniquement par rapport à la peur de la mort, qui ne m'avais jamais vraiment quitté mais pas non plus traumatisé jusqu'à ce jour, mais surtout pour toutes les complications que celle-ci entraîne : il n'est jamais aisé d'obtenir une belle et noble fin, et même si je n'étais pas un lâche, je nourrissais une certaine appréhension à laisser derrière moi une vision faussée et extravagante de ma vie, et encore plus de mes derniers instants.
1912. C'est dans deux ans. Ça me laissait quand même tout le temps de préparer cela dignement.