Blog / Éviter de trahir

Il s'était visiblement perdu. À perte de vue, les grattes-ciel pointaient de manière obscène vers les cieux, bouchant la visibilité sur plusieurs kilomètres, et là où auraient dû se tenir des montagnes, il n'y avait que cette débauche de modernisme et de dictature propres aux grands ensembles.

Il s'agrippa à sa malette. La combinaison de celle-ci était 4635, mais il pressentait que la résistance de son acier serait inutile face à des ennemis déterminés. Elle faisait son poids, non pas en tant que telle, mais depuis le temps qu'il la traînait avec lui. Sa silhouette se reflétait parfois dans les vitres des bureaux au rez-de-chaussée, tandis qu'il progressait d'un pas rapide et forcé. Il s'évertuait à se concentrer sur les chiffres de la serrure, pour mieux arriver à les oublier en temps voulu, et surtout pour faire une zone de vide dans son esprit. Une fois celle-ci bien en place, il s'y réfugia pour éviter de ruminer ce qui emplissait ses pensées : sa fuite, le contenu de la malette, et maintenant la perte du chemin dans cette ville hostile.

Il envisagea un moment de déposer la malette, là sur le sol, et de fuir. Peut-être le laisseraient-ils tranquille à cette condition ? Mais il en doutait de toute façon, et à 15000 francs d'honoraire la semaine, il pouvait bien éviter de trahir. Il se jura que s'il ressortait indemne de cette drôle d'histoire, il en fera son slogan.